Le théâtre de Marie Antoinette, un caprice?
Le théâtre... c'est un bien grand mot... Disons plutôt le petit théâtre, vous allez voir pourquoi. Mais ne brûlons pas les étapes et commençons par le commencement...
La passion de Marie Antoinette pour les planches remonte à sa plus petite enfance. Pratiquer les arts était chez les Habsbourg une tradition familiale et, à moins de quatre ans, l'archiduchesse Antonia, revêtue d"une somptueuse robe de cour, participe déjà à un petit spectacle en l'honneur de son père. Pour le second mariage de leur grand frère Joseph, Ferdinand, Maximilien et Madame Antoine interpréteront en 1765 Le Triomphe de l'amour à Schönbrunn.
Le Triomphe de l’amour, Johann Georg Weikert, 1778. © Château de Versailles, Jean-Marc Manaï
Plus tard, lorsque sa mère voudra la préparer à sa prochaine entrée à Versailles, elle donnera pour professeurs à la jeune Antoine deux acteurs, Aufresne pour la prononciation, nous révèle Madame Campan, et un nommé Sainville pour le goût du chant français. Initiative qui peut nous paraître à nous bienvenue, mais qui sera jugée par la Cour de France indigne d'une future dauphine.
L'amour de la scène ne va jamais quitter Marie Antoinette. A Versailles, elle interprète avec ses beaux-frères et ses belles-soeurs toutes les bonnes comédies du théâtre français, précise Madame Campan. Cette activité se passe dans le plus grand secret, pour échapper à la censure de Mesdames Tantes et à l'interdiction subséquente de Louis XV. Monsieur connaît sa partie à merveille, le comte d'Artois se débrouille assez bien, les princesses jouent mal et Marie Antoinette montre finesse et sentiment. Quant au dauphin, il s'acquitte du rôle du public avec enthousiasme.
Mais cette salle improvisée et ces conditions à la sauvette s'avèrent vite pénibles. Et, lorsqu'elle obtient et remodèle Trianon, Marie Antoinette, fidèle à son amour de la comédie, décide d'y faire construire un théâtre... un vrai! En 1777, elle demande donc à Mique de s'en charger, en s'inspirant de la salle du château de Choisy construite par Gabriel. Les travaux, commencés en juin 1778, prennent fin en août 1779. Comme à son habitude, la reine a surveillé les moindres détails de la réalisation. Le théâtre ne sera toutefois inauguré qu’en août 1780.
Entrée du petit théatre, avec les colonnes ioniques et la scupture du fronton, due à Deschamps
Le bâtiment existe toujours, mais les promeneurs passent souvent à côté, car rien en lui n'attire l'attention. A l'origine, il devait être dissimulé entre une montagne artificielle et la charmille du jardin français.
En sortant du petit Trianon, empruntez l'allée sur votre gauche. Bientôt apparaîtra un petit édifice néoclassique, flanqué de colonnes de style ionique. Si vous levez la tête, vous verrez un beau fronton triangulaire. Il signe la vocation de l'endroit où nous allons entrer, puisqu'il représente Apollon enfant entouré des attributs de la comédie et de la tragédie.
Et, ici, attention les yeux... parce que je vous assure que nous sommes sur le point de pénétrer dans un lieu enchantant et enchanté...